10 jours de congé paternité soumis au verdict des urnes
Le délai pour déposer le référendum contre la modification de loi pour dix jours de congé paternité expirait le 23 janvier 2020. Un comité issu des rangs de l’UDC déposa au dernier moment plus de 55'000 signatures validées auprès de la Chancellerie fédérale. Le peuple décidera donc si les pères doivent continuer à avoir le droit à un jour de congé paternité ou désormais 10 jours. Travail.Suisse, l’organisation faîtière indépendante des travailleurs et travailleuses, va organiser une campagne engagée pour le oui avec de nombreuses organisations alliées.
Le 27 septembre 2019, le Conseil national avait, par 129 voix contre 66 et deux abstentions, et le Conseil des Etats, par 31 voix contre 11 et 3 abstentions, approuvé en votations finales le contre-projet à l’initiative populaire sur le congé paternité. Pendant 20 ans, on discuta sur plusieurs interventions mais aucune d’entre elles ne trouva une majorité pour faire un pas pragmatique vers un congé paternité. Il aura donc fallu pour y arriver la pression de l’initiative populaire pour le congé paternité que Travail.Suisse a lancée avec 160 autres organisations. 10 jours de congé paternité était le maximum que l’on pouvait espérer du Parlement en tant que contre-projet. C’est d’abord le Conseil des Etats qui a rejeté les 20 jours demandés par l’initiative par 29 voix contre 14 et une abstention puis le Conseil national par 120 voix contre 67 et 5 abstentions. Le Comité d’initiative décida le 2 octobre 2019 de retirer sous conditions l’initiative. La majorité du comité estima qu’il serait difficile de gagner la votation devant le peuple et les cantons si de larges cercles ne soutiennent pas l’initiative et aussi qu’un non comme oui compliquerait la discussion en cours sur le temps parental.
Un référendum qui n’est pas été soutenu par l’économie
Pendant longtemps, personne n’avait annoncé un référendum contre le contre-projet, les associations patronales des partenaires sociaux, l’USAM et l’Union patronale suisse y ayant renoncé. Jean-François Rime, le président de l’USAM a dit à la radio SRF 1 le 16 janvier 2020 que son organisation soutiendrait les 10 jours de congé paternité. Dans un certain nombre d’entreprises et grâce à de bonnes conventions collectives de travail (CCT), de nombreux pères obtiennent déjà aujourd’hui un congé paternité de plusieurs jours. Les enquêtes menées par Travail.Suisse sur l’évolution du congé paternité dans les plus grandes CCT et auprès des collectivités publiques montrent que dans de nombreuses branches il existe, grâce au partenariat social, un congé paternité mais que l’évolution se fait très lentement (voir la fiche d’information sur le congé paternité dans les CCT, l’administration publique et dans les grandes entreprises)
Les entreprises ont ainsi réagi aux besoins des pères actuels. Le congé paternité reste toutefois contesté sur le plan politique : au dernier moment, des personnes ont lancé le référendum avec un large soutien de l’UDC. Il semble que l’UDC veuille montrer qu’elle est la meilleure représentante des intérêts de l’économie. D’ailleurs, le comité référendaire déploie des arguments non pas tellement contre le congé paternité mais contre des prélèvements salariaux supplémentaires. Selon les derniers calculs de l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS), il faut compter des dépenses de 229 millions de francs par an pour un congé paternité de 10 jours. Le Conseil fédéral doit relever le taux du régime des allocations pour perte de gain (APG) à 0,5 pourcent sur les salaires (0.25 pour l’employeur et 0.25 pour le travailleur). Seulement depuis 2016, on prélève 0,45 pourcent salarial du fait qu’avec la réforme de l’armée, moins de jours de service sont accomplis. Les prélèvements salariaux n’atteignent donc pas un niveau sans précédent comme l’ont indiqué les dirigeants du référendum. On ne créera pas non plus une nouvelle œuvre sociale car les coûts pour les 10 jours de congé paternité sont financés par le solide régime des APG comme pour l’assurance-maternité et le service militaire.
Selon les sondages, 83 pourcent sont pour le congé paternité
La situation se présente favorablement pour un oui dans les urnes. Un sondage représentatif de l’Institut LINK, à la demande de l’association « Le congé paternité maintenant ! » de septembre 2019, montre que 83 pourcent sont « pour » ou « plutôt pour » un congé paternité payé. Plus de 70 pourcent des sondés souhaitent plus que deux semaines de congé paternité. Le rejet le plus fort se situe en Suisse alémanique et parmi les plus de 60 ans. Les référendaires ont d’ailleurs bien senti que le congé paternité est dans l’air du temps et répond à un grand besoin de la population car ils ont eu beaucoup de peine à récolter les signatures nécessaires. C’est ainsi que le secrétariat de l’association « Le congé paternité maintenant ! » a reçu au cours de ces dernières semaines de nombreuses observations de citoyennes et citoyens comme quoi l’on récoltait des signatures pour le référendum avec des arguments fallacieux. Travail.Suisse condamne la récolte de signatures reposant sur des faits mensongers. Cette façon de faire mine la crédibilité de l’action politique.
Travail.Suisse planifie la campagne de votation et fonde un comité pour le oui
La votation sur le congé paternité devrait avoir lieu le 27 septembre ou le 29 novembre 2020. Le peuple se prononcera uniquement sur le contre-projet. L’initiative sur le congé paternité ne peut être soumise au vote par le comité d’initiative que si le peuple dit non au contre-projet de deux semaines. Mais Il serait peu réaliste après une telle votation de voter sur quatre semaines. Avec le retrait conditionnel, le comité d’initiative garde néanmoins cette possibilité ouverte Travail.Suisse va maintenant planifier la campagne de votation et fonder un vaste comité de votation non partisan pour le congé paternité. Des comités locaux dans tous les cantons devraient également assurer une large mobilisation. La solution présentée est certes un petit pas mais un pas important pour les pères en Suisse. Rejetée, cela signifierait que les pères continueront à n’avoir qu’un jour de libre, ce qui ne suffit même pas toujours rien que pour la naissance. Il n’y aura toujours pas de congé paternité fixé dans la loi et la Suisse resterait un « Sonderfall » car tous les pays européens ont un congé paternité ou un congé parental légal. Dans environ deux ans, tous les Etats membres de l’UE devront, outre le congé maternité, prévoir aussi un congé paternité de deux semaines et un congé parental de huit semaines pour les mères et les pères. Le congé paternité permet d’améliorer sensiblement la conciliation entre la vie professionnelle et familiale.
www.travailsuisse.ch / Twitter: @travailsuisse.ch / Facebook: @travailsuisse