Le Conseil des Etats refuse de tirer le bilan sur l’égalité
Hier soir, le Conseil des Etats a refusé le postulat de la jurassienne Mathilde Crevoisier Crelier qui demande qu’un bilan soit tiré l’année prochaine sur l’état de l’égalité entre femmes et hommes en Suisse. Travail.Suisse est déçue de cette décision négative. Les femmes souffrent toujours d’inégalité et de discrimination salariale sur le marché du travail, faute de mesures véritablement efficaces. À elle seule, la discrimination représente chaque année 8 milliards de francs au détriment des femmes.
La loi sur l’égalité va fêter les 30 ans de son entrée en vigueur le 1er juillet 2026. Pour la sénatrice jurassienne
Mathilde Crevoisier Crelier, c’est le bon moment pour tirer un bilan. L’égalité n’est pas que juridique, elle doit aussi être atteinte dans les faits comme le prévoit la loi, notamment au niveau économique. Le Conseil des Etats a suivi l’argument du Conseil fédéral, qui ne propose un bilan global qu’en 2030, arguant que des bilans sectoriels seront publiés avant.
En 1995 s’est tenue la quatrième Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes qui a débouché sur une Déclaration signée par 189 Etats, dont la Suisse. Tous les quatre ans, les pays signataires rendent un rapport sur la mise en œuvre de la Déclaration et du Plan d’action Beijing. Le rapport « Beijing + 30 » adopté par le Conseil fédéral en juin dernier le dit pourtant : « l’égalité entre les femmes et les hommes n’est pas encore atteinte dans notre pays : en moyenne, les femmes gagnent 18 % de moins que les hommes ». La part non expliquée – la discrimination – représente près de la moitié de ces inégalités. Pour Travail.Suisse, les mesures prises par la Suisse sont insuffisantes. La seule mesure concrète prévue sur le terrain par la Stratégie Egalité 2030 pour éliminer la discrimination salariale dans l’économie privée est des contrôles aléatoires dans les entreprises qui ont obtenu un marché public, une trentaine par année seulement. Logib, l’outil mis à disposition gratuitement des entreprises, existe, mais aucun contrôle ni aucune sanction en cas de non-respect de la loi sur l’égalité et son obligation d’analyser les salaires par les grandes entreprises ne sont prévus.
Pour Valérie Borioli Sandoz, responsable de la politique de l’égalité : « Le Conseil fédéral serait avisé de se pencher sur les recommandations du Comité sur l’élimination de la discrimination envers les femmes CEDAW d’octobre 2022. ». L’une des trente-huit mesures recommande que la Suisse adopte « un système plus efficace d'analyse et de lutte contre la discrimination salariale fondée sur le sexe, assorti d'objectifs assortis d'échéances, qui s'applique à toutes les tailles d'entreprise et doit être répété régulièrement. ». A défaut d’un bilan objectif, Travail.Suisse espère que le Conseil des Etats approuvera une révision de la loi sur l’égalité susceptible de produire des effets mesurables.