La situation géopolitique et économique dans le monde démontre que la hausse des migrations n’est pas un phénomène ponctuel, mais une réalité qui persistera encore ces prochaines années. La politique migratoire ne peut, dès lors, pas être menée sans de véritables objectifs destinés à renforcer l’intégration des personnes migrantes dans notre société et sur le marché du travail. Toutefois, si la nécessité de favoriser l’intégration est majoritairement admise dans les rangs politiques, il n’en va pas de même de la priorité à lui accorder et des moyens à mettre en œuvre.
La question récurrente de la gestion des flux migratoires et du contrôle des frontières ne devrait pas occulter la réalité de terrain représentée par la présence effective de migrants en Suisse. Or, non seulement les révisions législatives qui tentent de limiter l’immigration n’atteignent pas leur but, mais plus grave encore elles freinent le processus d’intégration des personnes déjà établies sur le territoire. En effet, les contingents créent, entre autres, des obstacles au regroupement familial et peuvent favoriser la précarité des statuts. Ces limites affectent ensuite la formation et l’accès au marché du travail. En sachant que l’intégration dépend de l’apprentissage d’une langue nationale, de la qualité de formation et de l’accès au marché du travail, il est dès lors important de garantir des conditions de vie permettant une certaine stabilité. À ce titre, Travail.Suisse considère que l’intégration est une priorité qui doit s’inscrire dans un cadre législatif et institutionnel renforçant le statut juridique des personnes migrantes. Ce statut devrait, d’une part, offrir des garanties suffisantes à une indépendance sociale et professionnelle et, d’autre part, permettre une participation citoyenne plus large et active. Ces efforts – sans oublier l’implication des employeurs dans le processus d’intégration professionnel – permettront de dessiner les contours d’une meilleure cohésion sociale en favorisant le savoir-vivre ensemble des Suisses et des migrants.
Avoir accès à la formation et au marché du travail sans distinction liée au statut de séjour
Les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire sont faiblement représentés sur le marché du travail et peinent à être engagés par des employeurs : seuls 30 à 40% d’entre eux sont actifs. À cet effet, la révision de la loi sur l’asile prévoit la levée de certains obstacles avec la suppression, d’une part de la taxe spéciale pour les personnes admises à titre provisoire, et d’autre part de l’exigence d’une procédure d’obtention d’une autorisation de travail ou de stage pour les réfugiés reconnus et les personnes admises à titre provisoire. Travail.Suisse salue cet allègement administratif qui constitue une amélioration pour l’intégration dans le domaine de l’asile. Cependant, il serait nécessaire d’accorder plus rapidement un permis de séjour aux personnes admises à titre provisoire pour leur permettre d’accéder plus facilement au marché de l’emploi, leur statut étant toujours mal perçu par les employeurs qui rechignent à les engager. Une meilleure information et sensibilisation auprès des employeurs est également importante pour qu’ils recrutent ces personnes. À ce stade, le niveau de formation du personnel engagé joue un rôle de taille sur les conditions de travail. L’accès à la formation devrait donc être renforcé et rendu possible, afin d’éviter la précarité de l’emploi et d’en permettre l’exercice sur le long terme. Par ailleurs, le rôle des entreprises est crucial dans l’encouragement à l’intégration des employés, par le biais de cours de langue et de formation continue.
Faciliter la naturalisation des étrangers de la 3ème génération
L’initiative parlementaire « La Suisse doit reconnaître ses enfants » demande à faciliter la naturalisation des jeunes étrangers issus de la 3ème génération. Bien que les cantons puissent déjà prévoir une réglementation cantonale, cette initiative permettrait une uniformisation légale à l’échelle de la Suisse et garantirait ainsi une meilleure équité. L’accès facilité à la nationalité suisse concrétiserait notamment l’intégration avérée de certains jeunes dont les parents et grands-parents ont vécu en Suisse. Travail.Suisse considère cette initiative comme une avancée juridique en termes d’intégration et de reconnaissance sociale des jeunes étrangers dont le lien avec la Suisse est assez fort. Faciliter l’obtention de la nationalité permettrait une plus grande participation sociale et politique favorable au développement de la société suisse.
Agir pour une meilleure protection contre les discriminations
L’existence d’une législation générale contre les discriminations permettrait un renforcement du respect des droits fondamentaux de tout un chacun, qu’il soit suisse ou étranger. Cette perspective est d’autant plus importante qu’il apparaît difficile d’envisager une intégration réussie dans une société qui ne lutte pas conjointement contre les discriminations. De plus, l’interdiction de la discrimination constitue une priorité dans la défense des droits humains, mais est encore mal protégée dans la Constitution et la loi suisse, en particulier dans le domaine non étatique, comme par exemple le marché du travail. L’existence d’une loi est donc importante, mais ne suffira pas : la mise en place de projets est tout aussi déterminante pour sensibiliser les acteurs de terrains et la société en générale. Travail.Suisse soutient l’idée qu’une meilleure intégration des personnes migrantes est profitable à l’amélioration des conditions de travail en Suisse.