La consultation du projet de prolongation du congé maternité en cas d’hospitalisation prolongée du nouveau-né court jusqu’en juin. Le projet du Conseil fédéral prévoit le paiement d’un maximum de 56 allocations de maternité supplémentaires aux femmes qui travaillent. Ce prolongement sera assorti logiquement d’une prolongation de la protection contre le licenciement. Travail.Suisse se positionne clairement en faveur de ce projet, qui permettra aux femmes concernées de ne plus subir une perte de gain dans une période particulièrement difficile.
En juin dernier, le Conseil national se ralliait au Conseil des Etats et acceptait une motion de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des Etats. Cette motion fait suite aux à deux postulats déposés il y a huit ans par Liliane Maury Pasquier (PDC) et Franziska Teuscher (PS). La copie du Conseil fédéral est maintenant sur la table : il propose une solution aux mères qui travaillent dont l’enfant doit rester hospitalisé durant plus de trois semaines après l’accouchement.
Travail.Suisse, l’organisation indépendante des travailleurs et des travailleuses, saluait cette sage décision. En effet, quand les débuts dans la vie d’un nouveau-né se présentent mal et qu’une hospitalisation est requise, sa mère peut déjà demander le report du versement des allocations de maternité. Elle ne les reçoit alors que lorsque son bébé rentre à la maison. Entre-temps, rien n’est prévu pour que son salaire lui soit versé, quand bien même elle a l’interdiction de travailler durant les huit semaines suivant l’accouchement. C’est sur cette question que portaient les deux postulats d’origine.
Le projet du Conseil fédéral prévoit un maximum de 56 allocations supplémentaires, ce que revendiquait Travail.Suisse. Cette durée correspond justement à la durée de l’interdiction de travailler contenue dans la Loi sur le travail. Cette formule permet de de couvrir 80% des cas annuels, relativement peu nombreux. En 2015, 1326 nouveaux-nés ont dû être hospitalisés durant plus de 21 jours. Parmi eux, 80% des cas n’ont pas excédé 8 semaines, soit 1000 à 1200 par année. Les coûts occasionnés par cette prolongation du congé maternité dans ces cas difficiles sont minimes (environ 5,5 millions de francs par année) et ne nécessitent pas d’ajuster la retenue sur les salaires auprès des employé-e-s et des employeurs-euses. Opposer une raison économique à ce projet releverait de la pure mesquinerie.
Lacune dans la loi – le versement du salaire dû sur les épaules d’un seul employeur
En effet, ce projet mettra fin à une véritable injustice provoquée par une loi lacunaire. Jusqu’à présent, les tribunaux ont eu une liberté d’appréciation pour décider si oui ou non la poursuite du paiement du salaire relevait du Code des obligations. Cette situation occasionne une insécurité juridique et augmente de fait la probabilité de litiges entre employées et employeurs.
Un jugement à Genève avait permis d’y voir un peu plus clair : une mère a droit au paiement de leur salaire durant cette période car il relève du Code des obligations (Art. 324a), soit le paiement au titre d’incapacité non fautive de travail pour des raisons inhérentes à la personne. A charge donc du seul employeur de la mère de prendre en charge le paiement de son salaire durant le temps d’hospitalisation de son nouveau-né juste après la naissance (et en cas de report du versement des allocations de maternité pour cette raison), car la mère n’est pas fautive. Pour certains petits employeurs, cela peut représenter une difficulté.
Formuler une solution avec la bien nommée « assurance perte de gains » APG permet de répartir les risques entre tous les employeurs et évite à quelques-uns une charge supplémentaire. Cette option permet aussi aux femmes indépendantes de pouvoir bénéficier de cette modification. Le projet prévoit aussi, logiquement, une prolongation du délai de protection contre le licenciement dont bénéficient déjà toute femme enceinte selon le Code des obligations (article 336) : de 16 semaines, il sera prolongé en fonction de la durée effective de l’hospitalisation du nouveau-né, mais au maximum de 8 semaines.
A noter que si un contrat ou une convention collective de travail prévoit déjà une telle prolongation du congé maternité, mais moins longue que dans le projet en consultation – par exemple de deux semaines, la nouvelle disposition fédérale ne permettra pas à la mère de toucher des allocations de maternité durant ces deux semaines, mais son employeur ne pourra pas la licencier avant l’échéance de la prolongation du congé (à moins que cela ne soit expressément prévu dans la CCT ou le contrat).
Travail.Suisse va donc formuler sa position en faveur de cet objet. Et il espère que les milieux traditionnellement opposés à toute amélioration de la conciliation du travail et de la vie de famille approuvent eux aussi ce texte, qui ne fait que réparer une injustice. Cette injustice touche à nouveau seulement les femmes, ceci dans un moment particulièrement difficile de leur vie. Même si cette injustice ne concerne qu’un millier d’entre elles chaque année, il est temps d’y mettre un terme.