Travail.Suisse, l’organisation faîtière indépendante des travailleurs, a lancé à fin mai l’Initiative pour un congé paternité. Aussi bien le soutien que lui accorde la population que l’insatisfaction suscitée par la situation actuelle traduisent bien la nécessité d’un tel congé, encore inexistant au plan légal, puisque la majorité des travailleurs n’obtiennent qu’un ou deux jours de congé à cet égard.
Il y a cinq mois, de concert avec quelque 140 autres organisations, Travail.Suisse a lancé l’Initiative populaire « Pour un congé de paternité raisonnable – en faveur de toute la famille ». Cette initiative demande un congé paternité de 20 jours, à prendre pendant l’année qui suit la naissance de l’enfant. Contrairement au congé maternité, il peut être pris à la journée et en souplesse. Pour autant que leur employeur y consente, les pères peuvent ainsi tester le travail à temps partiel, et utiliser leur congé paternité, par exemple, en restant à la maison dix jours entiers d’affilée, puis encore un jour par semaine pendant dix autres semaines. En revanche, le financement est prévu comme celui du congé maternité par le biais des allocations pour perte de gain (APG), employeurs et salariés versant chacun 0,06 pour cent du salaire. Pour un salaire mensuel de 6000 francs, ce montant correspond à peu près au prix d’un café par mois. Le financement d’un congé paternité pour les pères travaillant en Suisse est donc réalisable.
Le bilan intermédiaire de la campagne de signatures est réjouissant
Depuis le lancement de l’initiative, près de la moitié des signatures requises ont été réunies. La route est encore longue, c’est pourquoi la prochaine semaine de récolte de signatures aura lieu du 24 au 30 octobre. Les organisations affiliées à Travail.Suisse vont encore mettre le turbo. La semaine de campagne de signatures s’achèvera le 29 octobre à Lucerne par une manifestation placée sous la devise: « Nos enfants font beaucoup de tapage en faveur du congé paternité! » (« Kinder machen Lärm für den Vaterschaftsurlaub! »). Cette dernière semaine de récolte de signatures de l’année a pour objectif de mobiliser une nouvelle fois toutes les énergies avant l’hiver, afin de nous permettre de continuer sur la lancée pendant la saison hivernale.
L’engagement de la société civile est particulier et particulièrement réjouissant, puisque, une nouvelle fois, plus de 700 bénévoles déploient un bel effort pour cette semaine de campagne de signatures. L’écho est retentissant! Pour être équipés de manière adéquate, les bénévoles ont reçu un paquet contenant le matériel nécessaire à la récolte de signatures. Leur engagement est le signe que la population soutient largement notre projet et que l’heure d’un congé paternité payé a bel et bien sonné.
Conventions collectives de travail: pour la majorité, pas plus d’un ou deux jours de congé paternité
En Suisse, les pères ne disposent pas d’un congé particulier. Dans le cadre de l’art. 329, al. 3 OR, « heures et jours de congé usuels », ils peuvent prendre un jour de congé pour la naissance d’un enfant, pas davantage! Le même droit leur est accordé pour un déménagement: déménagement et nouvelle paternité, mauvaise comparaison!
L’introduction d’un congé paternité légal est donc nécessaire de toute urgence, comme le montre également une récente analyse de Travail.Suisse, qui a de nouveau examiné les principales conventions collectives de travail, incluant environ 1,5 million de personnes actives. A peine 40 % des travailleurs ne disposent que d’un seul jour de congé que leur accorde leur employeur lors de la naissance d’un enfant – si l’accouchement dure plus d’un jour, il se peut que le père ne puisse même pas vivre ce moment important si son employeur l’en empêche. 53 % des personnes actives examinées dans l’étude bénéficient de deux à cinq jours. Seules 8 % bénéficient d’un congé paternité de plus d’une semaine, dont 5 % entre 6 et 10 jours.
Graphique 1: Nombre de jours de congé paternité payés en fonction du pourcentage des travailleurs
Légende du graphique : Nombre de jours de congé paternité payés, en fonction du pourcentage de travailleurs
Source: propre enquête et propre présentation de Travail.Suisse
La Poste, qui accorde à ses collaborateurs un congé paternité de 10 jours payés, plus un congé de 4 semaines non payées, fait partie de cette dernière catégorie. Les CFF eux aussi offrent 10 jours qui – comme le propose l’initiative – sont à prendre au cours de l’année qui suit la naissance. Les collaborateurs de Swisscom bénéficient de la même offre. Quant à Migros, elle est la championne puisque ses employés bénéficient d’un congé paternité de 15 jours et ont droit, en outre, à 10 jours de congé non payés.
Finalement, le congé paternité permet aussi au père d’un nouveau-né de s’habituer à sa nouvelle situation et de prendre ses responsabilités dès le départ. Des pères présents contribuent à la stabilité de la famille, ce dont profitent non seulement le père lui-même, mais aussi l’enfant, la mère et en fin de compte la société tout entière.