La Commission sociale du Conseil national a clos la consultation sur la 6e révision de l’AI, volet b. Elle procède en grande partie sans la moindre considération pour les personnes concernées et n’hésite pas non plus à réduire les rentes en cours. Pour Travail.Suisse, une telle révision est inacceptable, et ce d’autant plus que l’AI, même sans la révision 6b, est sur la voie de l’assainissement.
Si l’on en croit la volonté de la majorité des membres de la Commission sociale du Conseil national (CSSS-N), les bénéficiaires de l’AI seront obligés, une fois de plus, de casquer considérablement avec la révision 6b. Ainsi, une nouvelle réforme de l’AI sera-t-elle entreprise principalement sur le dos des personnes concernées. Ce faisant, la Commission n’hésite pas non plus à briser des tabous: elle souhaite introduire un nouveau système de rentes et faire ainsi des économies. Ce nouveau système s’appliquera également aux personnes de moins de 55 ans qui bénéficient de l’AI.
Un nouveau système pour masquer des réductions de rentes
Certaines rentes seront réduites sous prétexte de mettre en place un nouveau système de rentes en partie linéaire. D’emblée, ce changement de système saute aux yeux: le système des rentes appliqué jusqu’ici avec ses quarts de rente, demi-rentes, trois-quarts de rente et rentes entières peut mener, par des effets de seuil, à ce que les personnes concernées aient finalement moins d’argent, bien qu’elles travaillent davantage. Toutefois, le changement de système est peu convaincant, notamment parce qu’il ne sera appliqué que là où les rentes pourront ainsi être réduites. En particulier, les personnes atteintes d’un fort handicap (taux d’invalidité dès 60 %) devront accepter des réductions de rentes aussi draconiennes. Il est clair que cette décision n’a pas pour priorité de créer un changement de système et d’améliorer l’intégration, mais plutôt de faire de manière simpliste des économies sur le dos des personnes concernées. La Commission sociale n’hésite pas non plus à réduire les rentes en cours. Voilà qui consiste à briser un tabou. L’exemple suivant illustre bien le fait qu’il ne s’agit-là que de faire des économies: les rentes en cours ne seront adaptées que si le taux d’invalidité est supérieur à 50 %. Et ce parce qu’avec le nouveau système, les bénéficiaires de l’AI dont le taux d’invalidité se situe entre 40 et 50 % verraient alors augmenter leur rente.
Réduire les rentes en cours pour accélérer de manière minime le désendettement de l’AI
En plus d’être une nouvelle désastreuse pour les personnes concernées, cette décision remet aussi en question la confiance que l’on peut avoir dans l’ensemble de l’AI et dans le système des assurances sociales. La sécurité juridique des personnes concernées joue manifestement un rôle secondaire. Ces mesures sont particulièrement intolérables, parce qu’il est possible de désendetter l’AI même sans recourir à la révision 6b. L’AI est en bonne voie de l’être. La révision 6b devrait lui permettre d’être libérée de ses dettes en 2025. Même sans cette révision-là, elle le serait d’ici à 2029, selon les prévisions actuelles. En effet, l’AI ne présentera plus aucun déficit en 2017, après l’expiration du financement additionnel. C’est donc uniquement pour un désendettement de l’AI plus rapide, sur quatre ans, qu’il faut s’accommoder de mesures draconiennes telles qu’une réduction des rentes en cours. Cela montre à quel point la majorité des membres de la CSSS-N ne se soucie guère, apparemment, du sort des personnes concernées. Oserait-elle procéder de manière aussi effrontée pour l’AVS?
Aucune obligation pour les grandes entreprises: les chances de succès d’efforts crédibles de réinsertion sont gaspillées
Si la Commission sociale avait sérieusement l’intention de déployer de nouveaux efforts d’intégration, elle aurait dû obliger les grandes entreprises à engager enfin davantage de personnes handicapées. De nombreux rapports expérimentaux et enquêtes montrent que ce sont souvent les grandes entreprises qui se dérobent à leur responsabilité lorsqu’il s’agit d’intégrer des bénéficiaires de l’AI. Des propositions appropriées ont pourtant été avancées. Mais apparemment, la Commission ne s’est guère orientée vers des efforts crédibles de réinsertion. En tout cas, le paquet proposé par la CSSS-N ne contient aucune mesure de ce genre. La décision prise de réduire les indemnités journalières pendant les mesures d’intégration est une autre indication de la poursuite peu convaincante de la réinsertion.
Les parents invalides et leurs enfants sont doublement pénalisés
Une autre mesure d’économie est prise au niveau des rentes pour enfants versées aux parents invalides: elles sont sévèrement réduites. De ce fait, les parents atteints d’un taux d’invalidité élevé sont doublement pénalisés: en premier lieu, leur rente de base est réduite, et ensuite sur cette rente de base plus faible, ils ne reçoivent plus qu’un complément de 30 % pour leurs enfants (actuellement 40 %). Pour rendre cette réduction plus décente, la Commission sociale remplacera la notion de rente pour enfant par celle de « rente parentale ». Mais quoi qu’il en soit, ce sont les parents et les enfants qui souffriront de cette mesure. De plus, la réduction des rentes pour enfants aura également une incidence sur l’AVS. Là aussi, ces prestations devraient diminuer.
Un référendum est sûr
Il est certain qu’un référendum sera lancé si le projet de loi subsiste sous sa forme dure et irresponsable. Il sera difficile de faire comprendre à la population la nécessité pour l’AI de procéder à des réductions de rentes aussi radicales alors qu’elle est de nouveau dans les chiffres noirs.