À la Conférence sur les places d’apprentissage, les partenaires prennent chaque fois des décisions stratégiques fondamentales concernant la formation professionnelle. Travail.Suisse, l’organisation faîtière indépendante de 170’000 travailleurs et travailleuses, est heureuse de constater que cette année encore la Conférence a donné de nouvelles impulsions.
La formation professionnelle est tenue de réagir à temps aux nouveaux défis. Ainsi seulement, elle reste capable d’anticiper, de tenir dûment compte des besoins de l’économie en main-d’œuvre qualifiée tout en restant attirante pour les jeunes et les jeunes adultes. De l’avis de Travail.Suisse, quatre décisions de la Conférence sur les places d’apprentissage1 sont particulièrement importantes.
Rapport général sur la formation de rattrapage
La loi sur la formation professionnelle prévoit la possibilité d’une formation de rattrapage. Dans sa forme actuelle, elle n’envisage pas cependant de la promouvoir systématiquement. Pourtant, si l’on considère l’évolution démographique et le manque prévisible de main-d’œuvre, le marché du travail dépend de plus en plus de cette formation de rattrapage, notamment celle de personnes qui ne possèdent aucun premier certificat de formation professionnelle. En réclamant un rapport général sur la formation de rattrapage, la Conférence sur les places d’apprentissage pose le premier jalon d’une promotion systématique et ciblée de cette formation. Travail.Suisse est convaincue que cette promotion de la formation de rattrapage des personnes sans certificat de formation professionnelle doit devenir un des sujets principaux de la politique de formation ces prochaines années. Un diplôme professionnel n’améliore pas seulement de manière durable la qualité de vie des personnes qui l’obtiennent, mais il est aussi bénéfique pour la société et contribue à pallier le manque de main-d’œuvre qualifiée que l’évolution démographique laisse prévoir. L’autre face de l’alternative, si l’on néglige la formation de rattrapage, c’est d’abord une immigration plus importante et ensuite une hausse des coûts de la sécurité sociale. Des études sur la formation de rattrapage publiées par Travail.Suisse (http://www.travailsuisse.ch/fr/node/3146) le montrent.
Mesures visant à promouvoir la mobilité dans la formation professionnelle
Dans les gymnases, il va de soi que les étudiants apprennent au moins deux langues étrangères en plus de leur langue maternelle. En outre, les gymnasiens et gymnasiennes ont la possibilité d’approfondir leur connaissance d’une langue étrangère par le biais d’une année d’échange linguistique international. La situation est tout autre du côté de la formation professionnelle. Environ 50 pour cent des jeunes en apprentissage professionnel sans maturité professionnelle ne sont soumis à aucune exigence en matière de langues étrangères. Dans le domaine des arts et métiers, la proportion atteint même 80 pour cent ! En outre, dans la formation professionnelle, les programmes d’échange et de mobilité ne font pas partie de la tradition. Du fait que la mobilité et l’étude des langues étrangères ne jouent qu’un rôle mineur dans la formation professionnelle, la Suisse a peu de chances de bien préparer ses apprentis à affronter le marché du travail européen et une formation continue. On attend d’eux de plus en plus qu’ils puissent comprendre et se faire comprendre en plusieurs langues et soient à même d’évoluer dans des contextes multiculturels. Travail.Suisse salue donc clairement les mesures prises pour encourager la mobilité dans la formation professionnelle.2
Renforcer la formation professionnelle supérieure et la maturité professionnelle
La haute qualification des professionnels grâce à la formation professionnelle supérieure et à la maturité professionnelle ouvrant sur les hautes écoles spécialisées est un facteur important pour la qualité, la productivité et la créativité de notre économie. Il est absolument nécessaire de les renforcer de manière à ce que leurs avantages soient connus aux niveaux national et international et que ces filières de formation soient reconnues comme équivalentes aux voies de formation générale. Pour atteindre cet objectif, Travail.Suisse estime qu’il serait judicieux que le futur Secrétariat d’Etat intègre mieux les partenaires. Il serait possible pour cela de faire appel à l’article 55.3 de la loi sur la formation professionnelle et de demander au Conseil fédéral que soient financés dorénavant par le biais de l’article 54 les projets spécifiques et novateurs des partenaires, visant à mieux positionner la formation professionnelle sur la scène internationale. Actuellement, il manque à la loi sur la formation professionnelle la notion de responsabilité des partenaires dans le positionnement international de la formation professionnelle. Cette demande devrait être présentée habilement lors d’une révision de la loi.
Utiliser davantage le potentiel des migrantes et des migrants
La Conférence sur les places d’apprentissage prévoit aussi de mieux utiliser le potentiel des migrantes et des migrants dans la formation professionnelle. Le projet de recherche MIRAGE <Les migrants qui gravissent les échelons sociaux >, de l’Université de Fribourg, donne d’importantes indications à ce propos. Il recommande notamment de laisser tomber les perspectives de déficit évoquées jusqu’à maintenant, de se focaliser sur le potentiel des migrantes et des migrants et de viser une promotion plus ciblée et plus « percutante » de la formation professionnelle. En recourant à des mesures ciblées de sensibilisation et de communication, il faut encore faire mieux connaître, et plus particulièrement aux immigrantes et immigrants, les possibilités variées de formation professionnelle3. À ce propos, Travail.Suisse s’est attelée à mettre sur pied un projet sur le thème de la « Formation des parents de langue étrangère : choix d’une profession et recherche de places d’apprentissage », en collaboration avec l’association faîtière des organisations de migrants (www.fimm.ch). Nous espérons que la Confédération soutiendra ce projet.