Développer l’économie circulaire pour l’environnement et les emplois
L’économie circulaire va être prochainement au programme du Conseil national par le biais d’une révision de la loi sur la protection de l’environnement. Travail.Suisse soutient la direction générale de la révision mais propose des améliorations. Le but est de contribuer à mieux préserver les ressources naturelles en favorisant l’innovation et en créant des emplois.
Le concept de « l’économie circulaire » est une approche globale qui tient compte de tout le cycle du produit, de l’extraction des ressources naturelles, passant par la conception, la production et la distribution avec une durée de vie maximale. Ses avantages par rapport à l’économie linéaire sont la prolongation de la durée de vie du produit, sa réutilisation et sa réparation (voir figures 1 et 2).
Figure 1 : Schéma de l’économie linéaire
Figure 2 : Schéma de l’économie circulaire
Les conditions-cadres actuelles encouragent plus une économie du recyclage qu’une économie de la réutilisation et de la réparation. De nombreux produits sont irréparable car l’objet n’est pas conçu pour l’être (p.ex. éléments soudés), les pièces de rechange sont indisponibles, le coût de la réparation est prohibitif ou l’absence de mise à jour du logiciel rend l’appareil inutilisable. C’est pourquoi, le concept de « l’écoconception » joue aussi un rôle fondamental dans l’économie circulaire.
L’économie circulaire est favorable à l’environnement mais aussi à la durabilité économique et à l’emploi. La réorientation industrielle qui découle de sa mise en œuvre est créatrice de nombreux emplois. Par la réparation, l’économie circulaire crée des emplois de proximité pouvant être occupés par des personnes peinant à se maintenir sur le marché du travail. Une partie de la valeur créée à l’étranger peut l’être sur le territoire suisse si les produits usagers y sont réparés et réutilisés, ce qui favorise l’emploi dans notre pays tout en diminuant l’empreinte écologique du produit.
L’économie circulaire connaît une croissance supérieure à celle du marché
L’application des principes de l’économie circulaire dans l’ensemble de l’UE pourrait accroître son PIB de 0,5% d’ici à 2030 en créant quelque 700'000 nouveaux emplois (1). L’économie circulaire est bonne aussi pour l’économie, car une utilisation plus efficiente des matières premières fait chuter les coûts de production et protège contre les fluctuations du prix des matières.
L’économie circulaire trouve désormais un ancrage légal dans l’Union Européenne (2). La Commission européenne a adopté des mesures pour l’économie circulaire. La directive sur l’écoconception y joue un rôle clé, définissant les exigences minimales des appareils ménagers (consommation d’énergie maximale et l’obligation de réparer ces derniers). Plusieurs pays membres de l’UE ont élaboré des stratégies d’économie circulaire. Par exemple, celle de la France prévoit l’introduction d’une interdiction de l’obsolescence programmée et une révision du droit de la garantie visant à favoriser la préservation des ressources. De nombreux pays de l’UE ont pris des mesures fiscales pour l’économie circulaire en réduisant la taxe sur la valeur ajoutée et l’impôt sur le revenu pour certaines réparations.
La Suisse est à la traîne par rapport à ses voisins. Le Conseil fédéral a répondu par des rapports au postulat Noser 18.3509 « Pour une levée des obstacles à l’utilisation efficace des ressources et à la mise en place d’une économie circulaire » et au postulat Vonlanthen 17.3505 « Étudier les incitations fiscales et autres mesures susceptibles de stimuler l’économie circulaire afin de saisir ses opportunités ». Il a chargé le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) de lui proposer un train de mesures pour l’économie circulaire au plus tard à la fin 2022.
Dans l’intervalle, l’initiative parlementaire 20.433 « Développer l’économie circulaire en Suisse » a été soumise à consultation et Travail.Suisse a soumis une «prise de position détaillée». L’initiative parlementaire vise à créer les conditions pour rendre l’économie suisse plus performante, réduire son impact sur l’environnement et augmenter la sécurité de son approvisionnement. La révision qui passe par une modification de la loi sur la protection de l’environnement a été approuvée par la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie CEATE-N. Elle a maintenu son avant-projet, avec très peu de modifications. Le Conseil national devrait examiner cet objet lors de la session de printemps 2023. Travail.Suisse soutient en particulier les éléments suivants :
- La réutilisation privilégiée par rapport à l’élimination.
- Des dispositions relatives à l’écoconception pour prolonger la durée d’utilisation des produits et réduire les conséquences néfastes pour l’environnement.
- Des exigences plus écologiques des matériaux de construction avec un effet positif pour le marché de l’emploi en Suisse.
- La valorisation et la récupération des métaux, ce qui créera aussi des emplois en Suisse.
- Le soutien à l’innovation pour poursuivre le développement de l’économie circulaire.
D’autres éléments du projet de loi devraient être améliorés :
- La conception de produits et d’emballages devrait être plus stricte et plus innovante, en reprenant des dispositions de législations d’autres pays européens comme l’obligation de garanties plus longues et contre l’obsolescence programmée. L’article 35i du projet est très important, en particulier l’alinéa 2 qui oblige de tenir compte des principaux partenaires commerciaux de la Suisse dans la mise en œuvre. La Suisse devrait alors reprendre les principaux éléments de la directive de l’UE sur l’écoconception.
- Le soutien à l’innovation prévu par le projet ne doit pas seulement bénéficier à l’économie privée pour le renforcement d’accords sectoriels mais aussi à des projets des partenaires sociaux ensemble ou séparément. Il faudrait aussi inclure des mesures de sensibilisation et de formation à l’économie circulaire pour les travailleurs et travailleuses tout comme prendre en compte leurs expériences issues de la pratique.
La pandémie de coronavirus et ensuite la guerre en Ukraine ont conduit à des ruptures des chaînes d’approvisionnement et des pénuries menaçant la sécurité de l’approvisionnement. Dans ce contexte, développer l’économie circulaire contribue aussi à moins dépendre de l’étranger et à renforcer la sécurité d’approvisionnement et l’indépendance économique de la Suisse.
Sources:
Figures: Office fédéral de l’environnement OFEV
1: Cambridge Econometrics Trinomics and ICF (2018), Impacts of circular economy policies on the labour market.
2: Un nouveau plan d’action pour une économie circulaire. Pour une Europe plus propre et plus compétitive. 23p. Commission européenne. 11 mars 2020